mardi 5 juillet 2016

La note merdique 1

J'ai longtemps hésité à écrire cet article parce que le vocabulaire qui me venait à l'esprit était très limité.
Du genre: période de merde, moral de merde, boulot merdique.
Et puis j'avais pas franchement envie de me plaindre, comprenant très bien mon secret espoir de susciter la pitié ou la compassion, pour un semblant de mieux aller par câlins virtuels.
Dans mon envie d'être parfaite, ou de le faire croire, j'ai eu du mal à me décider s'il fallait que je vous dise comme j'ai merdé ces derniers temps.
Mais là encore, vous dire que j'ai merdé, n'est ce pas déjà vous faire croire que je suis parfaite, l'artiste honnête qui se refuse d'être au dessus de tout. N'est ce pas déjà vouloir vous plaire?
A force de réfléchir sur ma réflexion, je me noie dedans.
Oui peut être que j'essaie de plaire, dans l'idée que l'honneteté paie toujours, que la modestie est de rigueur et la fierté à enrayer absolument. Petit cerveau aliéné par la société judéo-chrétienne. Nature profonde. On revient toujours au truc de l'inné et de l'acquis.
Je ne pourrais pas démêler ce paquet de noeuds aujourd'hui.
Mais par contre je vais vous raconter mes trois derniers mois , de merde, comme promis au debut de l'article.

Tout d'abord j'accepte une commande pour refaire ma grande pièce phare de l'année dernière, Notre Dame du Poulpe.
Je refuse pourtant habituellement de refaire une pièce. Mais là je connais la personne. Elle sait me convaincre. Je veux faire plaisir.
J'occulte un moment le fait que cette pièce m'a épuisée, elle a représenté trois mois de travail.
Même si j'ai convenu avec le commanditaire que la deuxième version serait plus petite, avec des couleurs différentes, et des positions de tentacules différentes, je finis par me rendre compte, au bout de 3 semaines de travail sur Notre Dame du Poulpe V2, que Non. Non. Je ne veux pas la refaire. Non je ne veux pas plaire. Enfin si. Mais non. Tant pis. Je veux m'écouter pour une fois. Et ça me crève le coeur. J'en pleure. Je suis déchirée. Entre la personne que je crois être, celle sur qui on peut compter, honnête et droite, et celle que je découvre, celle qui déçoit qui rompt sa promesse.

Pourquoi n'avoir pas écouté mon intuition depuis le début? Au plus profond de moi, je savais que ce projet était voué à l'échec. Mais pourquoi écouter son intuition? Toute ma scolarité, y compris aux beaux arts, on m'a demandé de m'en détacher. Tout doit être justifié, construit avec des codes intelligible et validés par la société.
Je sens pourtant bien que mes intuitions sont construites, d'une certaine façon. Mais je ne connais pas la grammaire de mes intuitions.  Mon inconscient semble la connaitre mais ne me la transmet pas. Il ne me transmet que le résultat.
Peut être que sur ce projet, je me suis d'abord déçue moi même de ne pas avoir su m'écouter.

3 semaines de poulpe avarié:

J'avais un beau specimen offert par quelqu'un qui compte pour moi.
J'ajoute à ma deception la projection de sa deception.


Le travail de décapage, toujours aussi long et fastidieux.


Déconstruction, reconstruction.


J'avais trouvé une astuce plus simple que la première fois pour la réalisation des tentacules. Dommage.


Le travail de résine avait été commencé, la main refaite, le ventre arrondi.


Voilà donc où je me suis arrêtée. C'est là que j'ai craqué. La deception justifiée du commanditaire me blesse profondément et pourtant, tête de bourrique que je suis, c'est FINI, j'arrête ce projet.

Alors je suis pas trop du genre à rester sur un échec. Je ne veux pas pleurnicher sur moi même. Du moins, pas trop longtemps. Pas plus de trois jours.

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