jeudi 2 avril 2020

la cérémonie de la Saintethé

Ce n'est pas la première fois que j'ai un déclic en me promenant à la brocante. Plusieurs pièces sont nées comme ça. Par exemple, Super Marie, S'embrasser, Notre Dame de la Jouissance...
J'avais dans l'idée d'inaugurer une nouvelle série de petites pièces à prix plus abordables, comme les nymphes, et je réfléchissais à une interaction avec des objets.
J'ai alors pensé à des petites fugitives qui s'échappent de divers objets.
Sans trouver encore vraiment par quel objet commencer.

Puis un jour de brocante, je suis tombée sur cette théière et j'ai su que ma série allait commencer!
J'ai immédiatement pensé à une fumée qui s'échappe pour se transformer en sainte vierge.
Mais techniquement c'était complexe, il fallait que je laisse mon cerveau y réfléchir un peu avant de me lancer.


Oh comme j'aime cette poignée en bois.


Après avoir laissé à mon cerveau quelques mois pour résoudre les problèmes techniques, je me suis lancée.
J'ai découpé la grille qui filtre le thé et j'ai glissé une tige en acier par le bec jusqu'au fond de la théière.


Après je n'ai pas la photo, mais vous allez me croire sur paroles: j'ai rempli le bec de résine (pâte epoxy) et j'ai collé la tige au fond de la théière avec de la résine également.
Si si, je le jure, j'ai fait ça.

Bon la tige est toute droite, il faut lui faire prendre forme.


Je fais un test avec une petite pièce que j'avais sous la main mais qui changera pour une légèrement plus grande.
Papa-jeune et sa grand mère la regardent pour vérifier que je fais pas n'importe quoi.


Et puis là hop! Je surprends tout le monde et je change d'atelier!

Je commence à monter la pâte epoxy autour de la tige en acier.


L'univers a mis sur mon chemin cette petite pièce pile au moment où je la cherchais.
Le timing était parfait.
Elle mesure environ 15 cm, sans le socle.



Par contre elle a le dos plat!


La peinture n'est pas très glorieuse, mais je pense que sous cette peinture épaisse se cachent de jolis reliefs.


Quelques heures de décapage plus tard, après du Décapant :


Bye bye le socle et les pieds!


Je profite du ponçage pour lui arrondir les angles du dos.


Après avoir fait grimper plusieurs bandes de pâte epoxy sur la tige, j'ai une belle guimauve, non?


Je scotche une bande de papier cartonné en spiral autour de la tige principale et je m'appuie dessus pour mettre en forme une volte de fumée.


Quand c'est sec je sépare les deux parties et je recommence ainsi trois fois de suite. En vrai quatre fois, car j'en ai foiré une, j'avoue. 
Je dois m'assurer que chaque nouvelle volute passe bien dessous ou dessus  la précédente sans la cacher complètement.
Pas si simple.


Oui je fais contre-poids avec ce qui me tombe sous la main.


ça veut dire qu'il est temps de remplir la théière de plâtre.


Je fais des essais de volutes dans tout les sens, je laisse dépasser, puis non, je tourne les volutes en sens contraire pour voir.
Bon ça fait un peu pelote de laine emmêlées.


L'avantage du plâtre c'est que, quand tu renverse la théière, tu n'inondes pas ta table.


Je passe au ponçage de ma guimauve, car je sais que je ne pourrais plus y accéder quand j'aurais fixé les volutes.


Il faut aussi retravailler toutes les volutes, les poncer et les rainurer. 



Je fixe la première en m'arrangeant pour qu'il y ait un point de contact au milieu pour la solidité de l'ensemble.



Je fixe la deuxième volute sur le même principe.


la troisième volute avait foiré, donc j'en refait une. Je réinstalle ma bande de papier cartonné.


Je ponce la volute et la resculpte.


Et voilà, je la glisse en tournant, elle se visse dans l'ensemble.


Après avoir fixé la dernière volute et poncé les jonctions, c'est autour de la petite sainte vierge de prendre sa place en haut.


Petit à petit je joins les volutes aux volumes de la robe de la sainte vierge.


Je rajoute du plâtre car l'équilibre est précaire.


Je termine la jonction avec la fumée et je ponce.


Puis je remet encore un peu de plâtre.




J'avais fais quelques petites retouches à la petite dame, mais j'ai pas pris de photos.
On aperçoit un peu ici, la rénovation, des mains, du voile sur la tête, du chapelet.



J'ai coulé de la résine cristal que j'ai teinté couleur thé. Je l'ai tein-thé quoi.


Après avoir peint l'intérieur et signé, je peux couler la résine pour donner un effet liquide très brillant.
J'aurais pu procéder différemment, et n'utiliser que de la résine cristal teintée à l'intérieur de la théière mais le coût de revient aurait été beaucoup trop important pour un effet qui n'est pas nécessaire à l'ensemble, puisque le sujet ici, étant la fumée. De plus la théière n'a pas pour vocation de rester ouverte.
J'ai donc choisi cet entre deux, qui fait flotter ma signature entre deux eaux.













Notre Saintethé










"Notre Saintethé" est la troisième pièce de la série des fugitives (ces petites saintes vierges qui s'échappent d'un peu partout).
C'est en réalité la première à laquelle j'ai pensé, mais elle est techniquement plus complexe, alors j'ai attendu un moment plus propice pour me lancer.

En ces temps de confinement, sortir une pièce comme celle ci est amusant. Je l'avais commencé avant l'annonce du gouvernement, avant même qu'on se soit imaginé que le virus allait fatalement passer par chez nous. Et puis je la termine dans cette ambiance étrange, alors qu'on ne peut plus sortir, elle ne se gêne pas elle. Ma petite fugitive. Elle a trouvé le moyen de changer d'état et de s'échapper. Mes petites fugitives trouveront toujours un chemin vers la liberté.

Vous prendrez bien une tasse de thé?



Hauteur 55 c,  largeur 40 cm, profondeur 15 cm.
Matériaux: théière plaqué argent Sheffield / tige acier / résine / plâtre / peinture acrylique / statuette en plâtre de récupération non signée.