Pour créer une illusion, il faut trouver la bonne pièce.
Celle où, même après la disparition du petit, il restera quelque chose d'énigmatique dans la façon de se tenir, où une certaine grâce subsistera malgré le vide.
J'ai donc repéré celle ci parmi les nombreuses pièces qui me regardent avec espoir chaque fois que je vais les examiner pour en choisir une.
Pas de regrets pour ce petit jésus, déjà assez abimé, avec une joue creusée et des doigts rabotés.
Très rapidement la Dremel accélère ce que le temps avait entamé.
En somme ce n'est qu'un petit coup de pouce.
Un peu radical, certes.
Mais efficace.
Le gros travail de disparition étant fait, il faut affiner en commençant à creuser et sculpter le plâtre afin d'obtenir une version possible de ce que cachait le petit Jesus.
Ensuite j'affine encore en ponçant les volumes obtenus.
Puis je réalise qu'elle a la poitrine plus plate d'un coté que de l'autre.
Sûrement la faute au petit Jesus, assis là depuis des lustres, qui a dû lui écraser tout ça.
Alors je rajoute une couche de résine pour récupérer la différence.
Et puis j'en profite pour faire une chirurgie plastique à la dame.
nez, arcades sourcilières, pommettes, menton.
Rien n'est laissé en décrépitude.
Les problèmes de peau c'est fini.
Je passe une deuxième couche de résine pour récupérer complètement la hauteur de poitrine.
Puis faut encore poncer tout ça, et bien affiner les mains, sans les casser.
Ensuite vient l'étape de l'apprêt.
Mais cette fois ce n'est pas une simple étape avant la couleur.
Ce sera la seule étape avec un pinceau.
Et pendant la séance photo, j'ai eu comme l'impression qu'un lapin déboulait soudainement pour bouffer le décor.
Sûrement une illusion.
J'ai préparé mes beaux crayons de couleurs avec soin.
Je voulais faire des points de couleurs avec les crayons pour pouvoir obtenir un rendu différent de la peinture habituelle.
Quelque chose de plus transparent qui évoque l'impermanence.
Une fois mon coloriage jouissif terminée, j'ai trouvé que la pièce pouvait être d'avantage mise en valeur avec un socle murale et une auréole.
Commençons par le socle.
Je fais quelque chose de très simple, dans l'esprit de la pièce sans ajout de fioritures pour ne pas détourner le regard du point principale de la pièce où tout se joue.
Il fallait juste encadrer la pièce sans détourner l'attention.
J'ai d'abord commencé à suivre la forme du socle d'origine avec une couche de résine.
Ensuite j'ai monté la masse principale en utilisant une forme sculpté dans de la mousse polystyrène.
J'ai recouvert d'une première couche de résine.
J'ai l'impression de faire de la pâtisserie des fois.
La par exemple, j'aurais étalé de la pâte à sucre sur une génoise.
D'ailleurs, vous ne serez pas surpris d'apprendre que je suis fascinée par ces vidéos montrant la réalisation de gâteaux aux formes complétement dingues réalisés en pâte à sucre.
On est là encore bien dans le thème de l'illusion d'ailleurs.
Je ne résiste pas à l'envie de vous partager un exemple de ces gâteaux:
Soit dit en passant, ça à l'air dégeulasse! XD
Alors je retourne à ma pâtisserie.
J'enlève la génoise maintenant que la pâte à sucre a durcit.
Bon mon gâteau va pas être très digeste parce que je rempli ma coque de plâtre synthétique.
On pourra pas le manger mais ce sera plus lourd et plus résistant pour l'accrocher au mur.
Quelques couches de résine plus tard, et quelques ponçages successifs, quand le socle a été relié à la pièce.
Maintenant que j'ai obtenu une surface bien plane et droite à l'arrière, je peux dessiner dessus des hiéroglyphes mystérieux dont moi seule connait la signification.
Je ne vous dirais jamais de quoi il s'agit.
Et en plus j'ai tout creusé maintenant.
Puis j'ai fixé des objets mystérieux dessus.
Je ne vous dirais rien non plus là dessus. C'est trop trop mystérieux.
Puis j'ai tout caché dans la résine.
J'ai ensuite peint avec un peu de peinture ocre pour avoir une base sous ma feuille d'or.
2 couches de feuilles d'or 24 carats plus tard:
Maintenant l'auréole.
J'en ai trouvé une de la bonne taille.
Il s'agit d'une estampe utilisé dans la fabrication de bijou.
Mais elle n'est pas doré.
Donc je ressors mes petites feuilles d'or.
Quelques petits trous de mémoire plus tard:
Je visse tout ça.
Et voici la pièce encadrée par le socle et l'auréole.
Un petit comparatif pour ceux qui ont pas envie de se refaire toute la note jusqu'en haut.
Quand à l'idée de la pièce, elle m'est venue au moment du deuil de mon père, dont la cruelle absence physique contraste avec tous les souvenirs, de qui il était, de ce qu'il m'a apporté, et qui m'accompagnent au quotidien d'une manière tout aussi réelle.
Cela m'a poussé à me demander si l'absence n'était qu'une illusion.
Cette pièce m'est alors apparue, symbolisant cette réflexion.
Je réalise désormais que l'absence peut prendre bien des formes,
que beaucoup brillent par leur absence, et pas seulement les défunts.
Les maris, les pères, les enfants, les dieux et que sais je encore...
Chacun y trouva certainement un sens qui lui est propre.
Je rajoute à ça que j'ai cherché longtemps le titre de cette pièce.
J'étais focalisé sur l'absence, mais je trouvais ça trop triste alors que je ne cherchais pas absolument à donner un sens négatif.
Et puis en travaillant, mon récepteur de cerveau à reçu une chanson, et là j'ai su!
Normalement si tout sa passe bien, vous devriez l'avoir en tête pour plusieurs jours.
C'est cadeau.
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